Une expérience managériale : Clash of clans ! (part. 2/3)

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Suite à notre premier article consacré aux liens entre le jeu vidéo « Clash of clans » et les pratiques managériales, nous poursuivons la mise en avant de principes de management utiles avec ses équipes.

 

METTRE EN PLACE UNE HIERARCHIE

Le jeu :

Au sein du jeu, la hiérarchie est relativement courte. Un clan se composera de 50 membres (maximum) au total. La hiérarchie est la suivante : Chef, Chef Adjoint, Ainé et membre. Chaque niveau possède des « pouvoirs » plus ou moins étendus qui vont de la capacité à faire passer des messages généraux à la capacité de recruter et surtout d’exclure les membres. Au-delà, le « Chef » peut déléguer des responsabilités à ses adjoints (animation de sous-groupes au sein du clan, organisation des guerres de clan, etc…). Si elle est courte la hiérarchie réveille parfois des vieux démons individuels de recherche de « titre », de « positionnement » ou de « pouvoir ». Il est étonnant de voir, lorsque les choses ne se passent pas comme prévu, comme cette dimension malgré tout très symbolique peut engendrer des débats sans fin ou des vexations assez phénoménales. Le Chef du clan doit être vigilant à cette hiérarchie, car, au-delà des crises de susceptibilité et de symbole, le clan ne peut se manager seul. Il importe de trouver des chefs adjoints de confiance, fiables et qui partagent la fameuse vision citée précédemment, sous peine de voir le clan exploser aux 4 coins des serveurs du jeu…

Le management et l’entreprise :

L’entreprise est elle aussi un monde hiérarchisé dans lequel se joue des enjeux de pouvoir et surtout des représentations du pouvoir. La question qui anime un manager et encore plus un dirigeant tourne autour du fait de savoir qui veut progresser dans la hiérarchie, et surtout pour quoi faire… Simple ambition personnelle ? Volonté d’avoir le pouvoir ou de se rapprocher du pouvoir suprême ? Envie de faire progresser les membres de son équipe ? D’être au service de son supérieur ? Toutes ces questions viennent parfois (souvent ?) détourner les individus du véritable objectif de l’entreprise : progresser, satisfaire ses clients et être vigilante par rapport à ses concurrents. Le choix des « bonnes personnes » aux bons postes est un art délicat et subtil…

La question clef :

Comment sont choisis, nommés, recrutés vos managers ? Nous constatons (hélas) que la plupart du temps, ils le sont pour des capacités techniques, ou, pire, à l’ancienneté… Il est rare, mais cela commence à se mettre en place, que les entreprises réfléchissent sur une réelle dynamique liant des compétences managériales avérées avec une nomination à un poste de manager. Cet état de fait laisse songeur sur le souci réel de performance des entreprises…

 

RIGUEUR, METHODE, DISCIPLINE

Le jeu :

Sans rigueur, méthode et discipline, impossible de gagner une guerre de clan en collectif. Coordonner 15, 20 joueurs ou plus réclame de la précision. A moins de tomber sur un clan qui est largement en dessous du niveau du sien (ce qui arrivera de moins en moins fréquemment étant donné que le jeu met aux prises des clans de force sensiblement équivalente) si chacun ne respecte pas les consignes… cela risque de tourner à la déroute… Ici les coordinateurs, les animateurs ont un rôle prépondérant, non seulement pour définir qui attaque qui et comment, mais également pour donner les bons conseils qui permettent de remporter le maximum de points. C’est ici également que commencent les grands moments de bonheur ou de crises de nerfs en voyant tout le monde faire n’importe quoi… Pas facile alors de manager tout ce petit monde à distance et très indépendant avec des profils et des motivations variées.

Le management et l’entreprise :

La question de la rigueur et de l’application des méthodes en entreprise est un débat (quasi) sans fin… Pour faire simple (et caricatural) nous avons d’un côté les tenants de l’application totale des méthodes sans interprétation, prise d’initiatives et improvisations. Si chacun applique scrupuleusement les process, tout se passera à la perfection. Les défenseurs les plus extrêmes de cette posture mettent même en avant le fait que le seul facteur de désorganisation et l’être humain, voire même que l’être humain ne doit être qu’un applicatif des consignes, méthodes et process.

De l’autre côté du spectre nous trouvons les partisans de l’improvisation, de la prise d’initiative permanente qui mettent en avant la plus-value unique de chaque acteur humain dans la performance. De ce côté, l’important est de ne pas brider la créativité, de ne pas mettre de cadres trop stricts et de laisser les méthodes (ou leur absence) à la libre appréciation de chacun.

Il va de soi que ces 2 options ne sont pas viables dans la durée, et qu’il faut trouver un compromis, un équilibre forcément instable et qui devra être réévalué au fil du temps pour assurer une performance qui reposera sur des méthodes et un cadre partagé, ET une capacité de chacun de pouvoir prendre des initiatives. Cet équilibre nécessite un réel travail collectif pour parvenir à cet équilibre qui mêle rigueur et capacité d’accompagner chacun dans sa capacité à prendre les bonnes initiatives, et à innover à bon escient.

La question clef :

Comment articulez-vous, au sein de votre équipe ces 2 dimensions du cadre des process et méthodes (voire comportements) et la capacité laissée à chacun (individuellement ou collectivement) d’innover et de prendre des initiatives ? La plupart des entreprises négligent de clarifier l’articulation adéquate, et perdent, de ce fait, en performance…

 

CREER DE LA COHESION

Le jeu :

Sans cohésion, les clans implosent. La liberté des joueurs est telle que certains quittent plusieurs clans dans la même journée… C’est dire le niveau de volatilité… La cohésion va se jouer grâce à 2 composantes : la capacité à mettre chacun en relation avec les autres et surtout la création d’un noyau dur de joueurs qui vont fédérer les autres autour d’eux. La mise en relation se fait grâce aux échanges qui s’opèrent sur le tchat du clan. Plus les joueurs échangent, plus la dimension relationnelle prend de force. Le noyau dur quand à lui doit être stable et managé, car c’est lui qui peut (va) créer les différentes affinités entre les styles de joueurs radicalement différents mais qui peuvent devenir complémentaires s’ils sont bien coordonnés.

Le management et l’entreprise :

La cohésion ne se joue pas dans la victoire, mais s’éprouve (au sens propre du terme, c’est-à-dire comme une capacité à faire ses preuves) dans les temps difficiles, voire de crise. Généralement les entreprises se soucient de la cohésion quand il est trop tard… autrement dit quand les relations sont délitées, quand la performance est en berne. La cohésion se travaille dès la mise en place d’une équipe et ensuite chaque jour. C’est un travail dans la durée car elle est un équilibre hautement instable qui peut être remis en cause par un nombre hallucinant de facteurs internes ou externes.

La question clef :

Autour de quoi se fédère votre équipe ? Le métier, la relation entre les personnes, des valeurs communes, une envie de performer ? Si vous n’avez pas la réponse à cette question, vous êtes en danger…

 

MANAGER LES TEMPS FORTS

Le jeu :

Au sein de « clash of clans », le temps fort c’est… la guerre de clans. C’est à ce moment là que se joue le meilleur (ou le pire) du collectif. Faire jouer ensemble 15, 20 ou 30 joueurs est une gageure… Si la préparation ne prime pas l’action, elle est une donnée essentielle. Préparer chacun dans le choix de ses défenses, de ses armées, de sa stratégie d’attaque, etc… Il est étonnant de voir à quel point les briefings sont utilisés dans clash of clans… Quel est ton objectif (1, 2 ou 3 étoiles ?) Comment vas-tu t’y prendre ? As-tu été vigilant par rapport à.. ? etc… C’est dans ce temps fort que l’on mesure la capacité du Chef et des Chefs Adjoints de donner de la motivation, des bons conseils, de la coordination, etc… ou pas… La capacité à mobiliser les joueurs (que chacun vienne bien réaliser ses 2 attaques en 24h), fait parfois la différence contre des clans qui sont plus forts. Il faut aussi savoir gérer les euphoriques comme ceux qui stressent (qui a dit que ce n’était qu’un jeu ?)…

Le management et l’entreprise :

Le management des temps forts est un réel problème aujourd’hui, car la vraie question qui se pose aux managers et dirigeants est : où sont les temps faibles ? En effet, dans la quête nécessaire (obligatoire dans certains secteurs) de recherche de performance permanente, d’amélioration continue des résultats et de la productivité, le temps de présence en entreprise s’est (parfois) transformé en temps forts permanents. Or, aucun individu ni aucun groupe humain ne peut être en situation de surperformance permanente. La réalité physique et mentale d’un individu est la nécessité d’articuler des temps forts et des temps faibles. Il n’existe pas les premiers sans les seconds…

La question clef :

Si, en tant que dirigeant ou manager vous ne managez pas activement les temps forts et les temps faibles, vous pouvez être sûr d’une chose que nous avons constaté depuis plus de 15 ans : les personnes prendront des temps faibles (arrêt maladie, burn out, baisse de performance, etc…). Alors ? quels sont vos basiques managériaux pour créer des temps faibles et opérer des rotations au sein des équipes pour être performant dans les temps forts ?..

 

FAIRE PROGRESSER

Le jeu :

La progression individuelle est l’une des clefs de la réussite d’un clan. Si chaque joueur ne progresse pas, le clan va stagner, voire régresser. Les clans les plus forts se sont constitués au fur et à mesure. On ne crée pas un clan de joueurs très forts du jour au lendemain. C’est une sorte de mythe de jeunes joueurs que de penser créer ex nihilo un clan de cadors. Tout comme la patience et le temps sont les clefs pour progresser individuellement, elles le sont aussi au niveau collectif. Si la cohésion fonctionne à plein, le transfert de savoir-faire va s’opérer de manière « quasi naturelle ». Il faut insister sur le caractère « quasi » du naturel, tant il est le résultat du « management global » du clan. C’est ici que les effets du recrutement ingénieux, de la bonne intégration et de la cohésion vont jouer à plein effet. Bien sûr la progression individuelle sans apport ni aide extérieure est possible. Elle est juste plus longue. Au contraire, bénéficier des conseils et de l’accompagnement de joueurs plus expérimentés est un plus dont la valeur se mesure à chaque progrès. Encore faut-il accepter d’être accompagné, de se dire que l’on ne sait pas tout et que ceux qui sont plus forts que nous ont beaucoup à nous apprendre. L’humilité personnelle est souvent la clef d’une progression fulgurante…

Le management et l’entreprise :

Les entreprises cherchent de plus en plus des personnes « déjà formées » et « pleinement opérationnelles » quasi instantanément. Ici encore, les managers et dirigeants sombrent corps et âmes dans la mythologie de « l’individu parfaitement adapté ». Mais comment est-il possible que quelqu’un venant de l’extérieur possède les compétences, le savoir-faire et le savoir-être de votre équipe ou de votre entreprise ? Ce n’est pas possible sans une intégration de qualité, et surtout un accompagnement dans le temps et régulier. L’apprentissage se fait chaque jour, même pour les profils experts, trop souvent délaissés dans le management. Or, quelqu’un qui n’est plus accompagné risque de ne plus progresser et, à terme, de se démotiver, de moins performer voire de quitter l’entreprise…

La question clef :

Comment est organisé et managé la progression des savoir-faire au sein de vos équipes ? Si elle ne l’est pas de manière active et claire, alors vous laissez la performance au hasard… ou à la bonne volonté des personnes qui travaillent avec vous. Vous prenez ce risque dans un univers de plus en plus concurrentiel où chaque entreprise va chercher des 10èmes de points de performance ?…

Fin de la seconde partie, à suivre dans un troisième et ultime article…

Sophie Girard & Jean-Olivier Allègre

Gouvernance et performance 2/2

Jean-Olivier /

Nous poursuivons notre méthode de définition d'une gouvernance d'entreprise efficace, pour plus de performance, plus de motivation et plus de cohésion...

Gouvernance et performance 1/2

Jean-Olivier /

La gouvernance est un sujet négligé dans bons nombre d'entreprises (notamment petites et moyennes) qui pensent que c'est un sujet inabordable, voire inutile. Si une gouvernance mal ficelée voire bancale peut mettre en péril une entreprise, une gouvernance bien pensée et surtout bien mise en acte est une source de performance économique, mais aussi de motivation et de bien-être pour chaque salarié. Nous vous proposons un petit guide (très) opérationnel que nous déployons chez nos clients.

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