No Future ! No managers !

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Cela faisait longtemps, hein? L’éternel recommencement… Dans une vision post apocalyptique, les néo penseurs du monde moderne nous le révèlent : Les managers, c’est fini ! Yes ! Allez, zou! Dehors ! Le monde de l’entreprise vit une RE VO LU TION ! Tous au pouvoir, tous aux manettes ! La hiérarchie a vécu, et il faut faire place à… à quoi? De nouvelles idées… « No Managers », « self-management », « holacracy », « déhiérarchisation », « autodirection ». Un retour d’anciens soixante huitards? « Marx Rebirth? » Non, du tout… J’ai lu avec délectation des articles dans des Grands Journaux Economiques Sérieux.

Les questions sont nombreuses, aujourd’hui, autour du management et de la place du manager ainsi que de ses rôles. Les organisations posent elles aussi de nombreuses interrogations face aux multiples changements, évolutions, la plupart du temps liées aux contextes des clients, mais aussi des technologies, qu’elles soient de production ou d’information.

UN MONDE INSTABLE

Les instabilités sont également de plus en plus présentes dans les entreprises, et ce à tous les niveaux : stratégie, production, organisation, relation client, commercial, SAV, etc… C’est un doux euphémisme que de dire que tout le monde cherche et tout le monde se cherche. Le management n’échappe ni à la question ni à la remise en cause. Comment manager aujourd’hui? Quelles relations développer ? Non seulement avec ses équipes, mais également avec ses collègues, et ses propres hiérarchiques, sa direction (locale, régionale, nationale, voire internationale) ? Toutes ces questions sont légitimes et elles se posent également dans la vie de chacun, à titre personnel : quelles relations sociales ? comment vivre et faire vivre les amitiés ? Et encore plus dans les relations intimes des couples… Comment vivre ensemble, à 2 tout d’abord, puis avec des enfants… Comment les élever, quelles postures ? quelle éducation? Quelles valeurs ? Et je n’ai encore ici rien dit du projet de vie…

La vie d’entreprise a bon dos, et nombre de personnes y jettent ou projettent également toutes leurs incertitudes personnelles, dans tous les services, et dans toutes les strates de management. La multiplication des « cabinets de bien-être en entreprise » témoigne de l’introduction de nouvelles dimensions (psychologiques, mentales, spirituelles, etc…) dans le monde professionnel. Notre époque est formidable en ce qu’elle est un creuset assez incroyable d’où sortent une multitude (une infinité?) de questions.

Alors pourquoi pas le « NO MANAGERS » ? Eh oui… Pourquoi pas… Intégrer le fameux mode horizontal des réseaux sociaux, qui nie toute verticalité, tout rapport de pouvoir. Repenser le pouvoir, partager le pouvoir. Repenser le « vivre ensemble », le « travailler ensemble », et le partager aussi. Est-ce possible?

D’un point de vue marketing, il est facile de dire « ensemble tout devient possible ! » De là à le penser sérieusement, c’est-à-dire à définir le cadre d’une telle potentialité, et encore plus de le mettre en application, vous avouerez qu’il y a loin de la coupe aux lèvres…

FIN DU VERTICAL

S’il n’y a plus de vertical, nous voici tous à l’horizontal… ce qui ne manque pas de piquant… Mais, soyons sérieux… sans nous lancer dans de grandes considérations philosophiques voire métaphysiques, comment penser l’horizontal sans vertical?.. Ces 2 concepts sont comme les notions de « droite » et de « gauche »… Ils fonctionnent ensemble dans une relation indissociable… Pas de droite sans gauche, pas de haut sans bas, pas d’horizontal sans vertical…

De plus, les réseaux sociaux ne fonctionnent pas en horizontal où, selon l’expression commune, « tous ont le pouvoir », voire même « tous ont le même pouvoir »… Sur les réseaux sociaux, il y a ceux qui « suivent » et ceux qui « lancent »… Il y a ceux qui ont une parole et ceux qui la relaient… Mais il est si facile de vivre dans l’illusion d’être « tous à la même hauteur ».

Il faut également clarifier la question du « qui est à l’origine de l’organisation sans organisation »? « Qui est à l’origine du pouvoir sans pouvoir »?… Délicates et généralement fâcheuses questions, tant on découvre, pour peu que l’on cherche que les ressorts cachés de certains modèles « à plat » sont largement aussi détestables que ceux de certains modèles verticalisés.

Après tout, les syndicats eux-mêmes, grands apôtres du partage du pouvoir dans l’entreprise ont des systèmes d’organisation interne et de mise en pratique du pouvoir qui n’ont rien à envier ni aux entreprises les plus radicales dans la concentration des pouvoirs, ni aux organisations les plus ténébreuses du Moyen-Age…

DES BALISES A METTRE EN OEUVRE

Oui, une entreprise sans manager est possible ! Et ne faisons pas dans l’angélisme ou dans le populisme. Soyons réalistes, car les évolutions des pratiques managériales en dépendent, et avec elles, de nombreux salariés et managers…

MATURITE RELATIONNELLE

Plus de manager ? Pas de souci, si chacun, dans l’équipe est capable de ne plus jouer à l’enfant, au pré-ado ou à l’ado… Autrement dit si chacun est capable de se positionner en adulte œuvrant avec d’autres adultes.

Sortie des jeux de pouvoirs immatures, capacité à la franchise envers soi et les autres pour faire progresser. Critiques constructives qui font avancer le groupe vers un objectif commun. Ce qui signifie une envie de prendre soin de l’autre, au sens plein du terme, de se décentrer pour comprendre de quoi l’autre a besoin pour avancer. La marque de la maturité se lit dans une pratique qui ne se pense plus comme le centre du monde à qui tout le monde doit tout, et qui s’exprime par caprice quand il n’est pas satisfait…

Autonome : c’est-à-dire capable de décider seul, non seulement en informant les autres, mais aussi et surtout pour le bien collectif et pas seulement dans sa perspective personnelle ou dans ses propres intérêts… Autonome : qui sait travailler seul en indiquant aux autres où il en est et comment il a fait, mais aussi qui sait travailler et collaborer avec les autres.

MATURITE SUR LES ENJEUX D’UNE ENTREPRISE

Une entreprise ce n’est pas un jeu, mais un lieu avec des enjeux. Cela ne signifie pas qu’il n’y ait pas de légèreté, de moments drôles et totalement décalés, mais chacun sait ce qu’est une entreprise, et que, si elle ne dégage pas suffisamment de manne financière toutes les envies et tous les projets disparaîtront… Une entreprise est au service de ses salariés, bien sûr, mais aussi de ses financeurs… et de ses clients… Satisfaire les clients est la donnée fondamentale de toute entreprise. Sans client, pas d’entreprise ! Sans capacité à financer ses investissements, ses innovations, plus d’entreprise non plus… Il est toujours intéressant d’écouter les discours d’anciens salariés qui créent leur entreprise et qui prennent alors conscience de toutes les dimensions à prendre en compte…

CAPACITE A ETRE RESPONSABLE

Etre responsable : répondre de soi et de ses actes. Première dimension, la plus basique, la plus simple.

Répondre des conséquences de ses actes, qu’elles soient prévues et prévisibles ou non (les fameux effets secondaires) : autrement dit ne pas se défausser, se défiler, du genre « ce n’est pas moi, c’est l’autre ! »; l’autre service, l’autre équipe, l’autre collègue, bref… un autre… Et surtout pas moi !

Mais aussi et surtout, dans une logique d’équipe, répondre non seulement de soi mais des autres, de leurs actes et des conséquences de leurs actes… Etre un tout, faire un tout, sans partie qui se dérobe quand la situation devient difficile. Tout le monde le sait dans l’entreprise : la vraie cohésion ce n’est jamais quand tout va bien et que l’on gagne, c’est quand l’équipe fait face à une situation difficile, tendue, délicate… La cohésion, comme la responsabilité, cela s’éprouve, et cela s’éprouve (épreuve) toujours dans un moment de crise…

Responsable et ensemble pour le meilleur et pour le pire… comme qui dirait….

CONSCIENCE PROFESSIONNELLE

Bien faire son travail, sans forcément un contrôle ou une contrainte externe, extérieure. Réaliser pleinement sa mission, sa tâche, son opération sans se sentir forcer, mais par obligation, autrement dit, par une envie intérieure, par une puissance intérieure qui dit « un travail fait est un travail bien fait, terminé », et je sais que celui qui vient après moi peut me faire confiance, peut avoir confiance en moi.

Je travaille bien pour moi et pour l’équipe car je me sens partie prenante. Je suis curieux car j’ai envie de m’améliorer pour apporter plus à l’équipe, mais aussi pour me réaliser.

Conscience professionnelle : je ne fais pas les choses à moitié, et surtout, je ne laisse pas mes problèmes aux autres…

CAPACITE A FAIRE CONFIANCE

Je crois que l’autre qui l’accompagne dans l’équipe est tout aussi digne de confiance que je le suis.

Ici encore la confiance ne se décrète pas; elle se vit, au quotidien dans des actes, dans des paroles et des engagements qui se concrétisent. Elle se vit mutuellement, car elle n’est pas aveugle. La confiance a un ressort lié au pari : je ne suis jamais totalement sûr que celui à qui je l’accorde ne trahira pas… Mais si je ne prends pas le risque (mesuré) je ne saurai jamais. Cette posture suppose un pas dans le vide… Mais sans elle pas de relation durable, pas de cohésion, pas de vivre ensemble, pas de travailler ensemble.

PARTAGE D’UN PROJET COMMUN

Que faisons-nous ensemble ? Que construisons-nous ensemble ? Aujourd’hui et demain !

Un projet commun c’est tracer un chemin que l’on empruntera en équipe, c’est avoir une visée commune sur un objectif proche ou lointain.

Sommes-nous d’accord sur la destination ? Comment gérer nos différents sur des envies et des objectifs différents?

Le projet se vit, s’éprouve; pas toujours dans une harmonie parfaite, mais ce n’est pas mortel : il faut aussi savoir vivre, travailler et coopérer avec ses différences et ses désaccords. Le projet commun est la concrétisation, la réalisation des différentes balises décrites ci-dessus. Le projet est le révélateur d’une aptitude à co créer, à co décider, et à co opérer.

PARTAGE DE VALEURS COMMUNES

Que faisons-nous ensemble (bis) ? Que partageons-nous dans nos pratiques… Pratiques métiers (comment faisons-nous notre métier jour après jour?) Pratiques client (comment nous articulons-nous avec nos clients?) Pratiques commerciales (comment vendons-nous nos produits et nos services?) Pratiques d’organisation (comment se déroule le travail au quotidien?)…

Les valeurs forment le cœur de tout groupe humain, qu’il en soit conscient ou non, familial ou professionnel.

Partager des valeurs, c’est partager une vision du monde, une vision de l’Humain, qui va se décliner en vision de l’entreprise…

Sans une culture commune forte, capable d’intégrer sans se renier, un groupe humain n’est en définitive, qu’un tas d’individus plus ou moins bien articulés…

EN CONCLUSION ?

« NO MANAGER », avons-nous titré, reprenant de récents articles publiés de ci et de là…

Comme nous l’avons montré, cela est une possibilité, mais une possibilité qui a besoin de réalités.

Les seules vraies questions sont… Qui se lance? Qui en est capable? Qui relève le défi (salariés et « ex » managers)?…

Finalement, l’entreprise sans manager ressemble à s’y méprendre à une thématique sur laquelle, étudiant en philosophie j’avais passé beaucoup de temps à méditer : comment créer une communauté de sages?..

JEAN-OLIVIER ALLEGRE

Gouvernance et performance 2/2

Jean-Olivier /

Nous poursuivons notre méthode de définition d'une gouvernance d'entreprise efficace, pour plus de performance, plus de motivation et plus de cohésion...

Gouvernance et performance 1/2

Jean-Olivier /

La gouvernance est un sujet négligé dans bons nombre d'entreprises (notamment petites et moyennes) qui pensent que c'est un sujet inabordable, voire inutile. Si une gouvernance mal ficelée voire bancale peut mettre en péril une entreprise, une gouvernance bien pensée et surtout bien mise en acte est une source de performance économique, mais aussi de motivation et de bien-être pour chaque salarié. Nous vous proposons un petit guide (très) opérationnel que nous déployons chez nos clients.

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