2026 : La Parrhèsia va-t-elle disparaître ?
Disparaître, comment ?
Par fermeture, par épuisement, par dilution, par compromis ? Ou disparaître autrement, plus silencieusement : par la perte progressive du courage de dire vrai, par l’habitude des mots qui protègent et trahissent leur propre sens, par la tentation de “faire propre” plutôt que de regarder le réel en face.
La parrhèsia n’est pas une posture morale, ni un geste “humaniste” de confort. C’est une discipline exigeante. Elle protège la dignité, elle soutient l’humanité, et elle rend la performance plus robuste, parce qu’elle empêche la fabrication d’illusions. Dire vrai, ce n’est pas “tout dire”, ni “parler fort”. C’est éclairer ce qui doit l’être, au bon endroit, au bon moment, pour décider juste, et éviter le prix exorbitant des non-dits comme des mensonges.
En 2026, nous voulons (encore et toujours) tenir cette ligne : ni angélisme, ni cynisme. Pas de performance de façade. Pas d’humanité de slogan. Une performance réelle, parce que reliée à la dignité et à l’humanité.
Penser ce que personne n’a pensé sur ce que tout le monde voit… Un défi sans cesse à renouveler
« La tâche n’est pas de voir ce que personne n’a vu. Mais de penser ce que personne n’a pensé sur ce que tout le monde voit. »
Arthur Schopenhauer
Il y a des années qui demandent de l’élan.
Et il y a des années qui demandent d’abord de la justesse.
À l’orée de 2026, nous ne voulons pas vous souhaiter une “belle année” au sens décoratif du terme, mais une année vraie.
Une année où l’on reste debout.
Une année où l’on avance, sans se mentir.
Une année où l’on retrouve ce goût rare de la réalité, celle qui résiste, celle qui oblige, celle qui féconde.
Parce que fondamentalement, c’est cela que nous travaillons, avec vous, depuis le premier jour de Parrhèsia en 2002. Dire vrai. Non pas “tout dire”. Dire vrai. Choisir les mots qui éclairent plutôt que ceux qui couvrent, cachent et mentent. Remettre de la conscience là où l’on glisse trop vite vers des automatismes.
Remettre de l’humain là où la mécanique gagne du terrain.
Remettre de la dignité et du sens là où le bruit envahit toute la place.
Ce que tout le monde voit, et ce que l’on évite de penser
Tout le monde voit que nos organisations sont sous pression.
Tout le monde voit la fatigue, la vitesse, les injonctions contradictoires, les tensions dans la « cohésion », les replis silencieux, les colères qui montent, les agendas qui saturent, les arbitrages qui s’empilent et parfois se dérobent.
Tout le monde voit aussi les transformations, les optimisations, les rationalisations, les outils et les process (nécessaires) mais qui perdent leur sens, les KPI, les “reportings” qui rassurent autant qu’ils anesthésient.
Mais il est plus rare de penser ce que tout cela révèle.
Il est plus rare de poser la question qui fait mal et qui sauve à la fois.
Que nous sommes en train de “fabriquer”, comme culture, quand nous croyons seulement “tenir la performance” ?
Que nous sommes en train d’autoriser, comme comportements, quand nous laissons la violence ordinaire gagner du terrain ?
Que nous sommes en train d’éteindre, comme désir de bien faire, quand la reconnaissance devient un sujet secondaire ?
Le réel ne demande pas des slogans. Il demande un regard. Et une décision.
2026, une année pour retrouver des actes simples et décisifs
Notre vœu, pour vous, ce n’est pas l’optimisme. C’est la lucidité habitée.
Lucidité sur ce qui ne fonctionne plus, et surtout : « comment le transformer ? »
Lucidité sur ce que chacun porte, même sans le vouloir, et surtout : « comment en sortir ? »
Lucidité sur la part de responsabilité qui revient au management, non comme pouvoir, mais comme service et comme clef d’orientation.
Et surtout, une lucidité qui se traduit en actes. Des actes simples, mais non négociables.
Dire bonjour et regarder vraiment.
Clarifier un rôle au lieu de laisser pourrir une ambiguïté.
Nommer un désaccord au lieu de le laisser se transformer en ressentiment.
Reprendre un rituel d’équipe, parce que l’équipe ne se construit pas par déclaration.
Faire un retour vrai, exigeant et respectueux, parce que c’est cela aussi, la dignité au travail.
Décider, enfin, plutôt que de repousser indéfiniment, et appeler cela “prudence”.
La maturité d’une organisation (comme celle d’un dirigeant ou d’un manager) se mesure souvent à ce qu’elle ne laisse pas dériver.
Notre engagement, en 2026
En 2026, Parrhèsia continuera d’être fidèle à son ADN originel, à ce que nous voulons être depuis le début : un lieu de parole franche, une exigence de réalité, une défense concrète de l’humain, des méthodes et des outils au service de la profondeur et de la dignité humaine dans le monde professionnel.
Nous continuerons à travailler au plus près des équipes, des managers et des dirigeants, dans ce mélange qui fait notre identité : prendre soin du réel, sans idéalisme, et prendre soin de la personne, sans mièvrerie.
Nous continuerons à tenir ensemble trois piliers qui ne vont pas toujours ensemble dans le monde du travail :
la performance, parce que l’entreprise doit vivre
le collectif, parce que rien de durable ne se construit seul
et l’humanité, parce que l’efficacité qui abîme l’humain finit toujours par abîmer la performance.
Un vœu très concret
Pour 2026, nous vous souhaitons une année où vous pourrez :
retrouver de l’air dans ce qui vous semblait étroit,
retrouver une direction dans ce qui vous semblait confus,
retrouver du courage et de la fermeté là où l’émotion déborde,
retrouver un langage précis là où les mots s’usent et abusent,
retrouver un goût du travail bien fait qui n’écrase pas, mais relève.
Et si l’année devait vous éprouver, alors nous vous souhaitons ceci : que vous sachiez à quoi vous tenir, intérieurement, et avec qui cheminer, concrètement et dans la durée.
Merci à celles et ceux qui nous lisent, nous challengent, nous font confiance, et nous obligent à rester à la hauteur de la Parrhèsia. Merci aux équipes qui osent regarder leur réalité en face, ainsi qu’aux managers et dirigeants qui acceptent que l’autorité ne se mesure pas au contrôle, mais à la capacité de rendre plus humains ceux qu’ils conduisent.
Oui, 2026 ne sera pas une année de sinécure ; elle réclamera des efforts marqués et soutenus.
Alors : « Belle année 2026 ».
Une année vraie : tenir la parrhèsia, tenir la dignité, tenir la performance.
Sophie GIRARD &
Jean-Olivier ALLEGRE
Philosophe (toujours), consultant (très souvent), veilleur (autant que possible)
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